Ce 08.07.2008
Ils ont attaqué des dizaines de sites, dont celui du ministère de la Santé, modifiant leur apparence. De la prison ferme a été requise contre l'un d'entre eux. Jeudi et vendredi dernier, les 3 et 4 juillet, onze pirates informatiques français âgés de 18 à 29 ans ont comparu devant la douzième chambre du tribunal correctionnel de Paris pour avoir modifié l'apparence - ou « défacé », selon le jargon de ce milieu - des pages de plusieurs sites Internet. Parmi leurs cibles se trouvaient ceux du ministère de la Santé et du tribunal de grande instance de Paris.
La justice leur reproche de s'être introduits frauduleusement dans un système informatique et d'en avoir modifié ou supprimé des données. Des peines de prison fermes et avec sursis et des heures de travaux d'intérêt général (TIG) ont été requises pour les uns et les autres.
Tout a débuté au début de 2005. Une bande de « copains » du Web s'amusent à modifier des sites Internet, afin de montrer leurs compétences informatiques. Pas de « petits génies » en vue ici, les prévenus ne faisaient qu'exploiter des vulnérabilités classiques, diffusées sur des forums en ligne.
A cette époque, d'ailleurs, des dizaines de sites Internet français sont la cible de pirates situés aux quatre coins du globe : citons les universités de Montpellier, Paris VIII, Caen, Lyon III, Avignon, Lille, Valenciennes, Marseille, l'Insa, l'Institut catholique de Paris, ainsi que des Mairies, les ministères de l'Agriculture et de l'Enseignement ou encore la préfecture du Calvados. Autant dire que les onze pirates français jugés n'avaient rien d'exceptionnel, malgré ce qu'ont pu en dire leurs avocats...
En avril 2005, les choses s'accélèrent, du fait d'un conflit entre certains membres du groupe et d'autres « défaceurs ». Pour prouver leur « savoir-faire », les onze s'attaquent aux sites du groupe de casinos Partouche, de l'école HEC, de la chaîne de restaurants Hippopotamus ou encore à deux serveurs Internet du tribunal de grande instance de Paris, tgi-paris.justice.fr et ca-paris.justice.fr, hébergés par le ministère de la Justice.
Un informaticien ayant travaillé pour la Police nationale... Les sites sont « défacés » par un groupe qui se fait appeler, à l'époque, « D1G1T4L-K1D gr0uP ». Certains des pirates qui ont comparu devant les juges en sont les instigateurs. A la place des pages officielles, ils diffusent un règlement de compte en bonne et du forme : pour prouver leur suprématie, ils mettent en ligne l'identité de « concurrents », avec noms, adresses, numéros de téléphone et photographies.
Trois d'entre eux s'amusent sur le site du ministère de la Santé, en affichant le 2 février : « Le cannabis, j'en ai fumé. Je préconise une prise intensive, au minimum deux fois par jour, pour essayer de se sentir bien dans un monde dirigé par nos chers technocrates. » Autant dire que le ministère n'apprécie l'humour, surtout que l'un de ses serveurs (drogues.gouv.fr) avait déjà été visité le 31 janvier 2005 par un pirate du nom de NoPh0BiA. Il porte plainte, comme d'autres sites victimes.
En remontant la trace des onze pirates, les policiers découvrent avec surprise que l'un d'eux est un informaticien de 25 ans qui a travaillé pour... la Police nationale ! Le procureur de la République, Christine Le Guellec, a mis en avant l'encouragement « à la consommation de cannabis » et demandé quatre mois de prison, dont deux ferme, pour cet ancien développeur. Ses deux complices risquent quatre mois de prison avec sursis et une forte amende. Les huit autres complices risquent des heures de travaux d'intérêt général. Le jugement a été mis en délibéré, à une date inconnue pour le moment.
Source : 01net